Un mariage bien
marocain…
Un jour, en été, je m’ennuyais à la
maison : vacances, rien à faire, pas d’argent pour sortir… Alors, maman me
proposa de l’accompagner au mariage de la fille d’une de ses amies, que je ne
connaissais pas, pour me distraire un peu. D’habitude, je ne suis pas très
branchée sur ce genre d’attroupements, mais, cette fois, j’acceptai pour casser
la routine dans laquelle je baignais. Je voulus aller en jeans, mais ma mère
refusa. Elle me passa une de ses tgachtes.
Elle était noire avec des fleurs rouges et m’allait bien. Pas question non plus
que je parte avec mes baskets Nike. Je dûs mettre une paire de chaussures
noires avec de hauts talons. Dés que je la mis, je commençai à regretter
d’avoir accepté cette invitation.
20h, C’est l’heure de partir.
Arrivées, nous fûmes accueillies par la mère de l’épouse. Maman lui passa le
cadeau en l’embrassant. Nous rentrâmes, la salle était pleine de femmes et de
filles qui, toutes, nous regardaient d’une manière bizarre. Je voyais leurs
pupilles monter et descendre. Elles nous examinaient de la chaussure à la coupe
de cheveux en passant par tout le reste. Après ce scan collectif, elles
commencèrent à chuchoter. Maman choisit
de s’asseoir à cotés de ses copines de travail.
21h : L’orchestre commença son
travail. La piste de danse se remplit peu à peu. Les non-danseuses dansaient
avec leurs langues de vipère et se disaient des trucs du genre « chofi ya
khti tagchita diyalha jat biha l3arss dyal fatima f ssif li fat !
tgol ma3ndha matlbass ! » ou « Saïda danse comme un sac
de pommes de terre. A sa place, moi, j’aurais honte ! » Du coup,
quand j’entendis ça, je refusai l’invitation d’une voisine de table à danser,
je m’excusai gentiment en disant que ma cheville me faisait mal, ce qui n’était
pas du tout vrai ! Le spectacle des non-danseuses m’attirait plus que le
plaisir de danser De plus, moi qui marche tellement mal avec les hauts talons,
je danserais très mal et ces vipères ne parleraient que de moi pendant tout le
restant de la soirée !
22 h : Les deux mariés sont
là, la femme avec un très beau caftan rouge, son mari avec un complet noir. Les
discussions entre les femmes reprirent. La famille de l3rossa disait qu’elle
est plus belle que son mari et que ce
dernier, vieux et gros, ne la méritait pas.
La famille « adverse » disait la même chose : «la mariée
est une fille légère, grosse avec des yeux qui louchent et elle a épousé notre
hajje pour son fric ! »
23h30 : Enfin, le dîner est
servi. Les langues de vipères se manifestent une fois de plus et, à chaque
table, les critiques sur le poulet trop
cuit ou trop petit, la pastilla faite avec de vulgaires crevettes chinoises ou
encore le dessert indigne d’une fête de noces : des cubes de pastèque même
pas dénoyautés !
Après le dîner, le ventre plein,
nos chers invités purent admirer la mariée et son défilé de mode : habits soussis,
jblis…et même japonais. A ce moment, je me jurai que, si un jour, je me mariais,
je le ferai en jeans et jaket de cuir !
Les negafates ne cessaient de crier : « la mariée
est réservée… ». Je ne sais pas comment elles arrivent à
parler normalement les lendemains des fêtes. Un peu plus tard, l’orchestre
commença une chanson cheulha et personne ne put résister à ces rythmes
endiablés. Même moi avec mes hauts
talons, je courus vers la piste ! J’adore cette musique et tant pis si
tout le monde se moque de moi. J’ai le droit de m’amuser un peu, non ?
J’ai dansé avec ma mère pendant toute cette partie. Après, place aux gâteaux,
tout le monde mangeait avec appétit. Tous les invités semblaient heureux, même
moi, j’ai le moral, je ne suis plus triste.
A 3h du matin, j’avais sommeil, je
voulais retourner chez moi mais ma mère voulait encore rester à discuter et
critiquer. A 4h, sous de grands youyous,
on découpa la pièce montée et on distribua les petits carrés à tous les invités.
Pas mal. J’en repris. Les mariés sortent
accompagnés de tous les invités et montent dans une voiture qui les ménerait à l’hôtel. Les noces étaient
terminées.
5h du matin, papa arriva pour nous
ramener à la maison. Je lui passai des gateaux aux amandes pour l’encourager à
bien commencer sa journée de travail.
Le lendemain, je passai toute la
journée au lit très fatiguée, par
contre, maman la passa à raconter les détails de ces noces à mon père en
critiquant toutes invitées !
Ihsane Riyani
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